Fibrine et mucines

Fibrine:

La fibrine est une observation fréquente sur un frottis sanguin. On l'observe sous la forme de filaments pâles, faiblement basophiles, isolés ou enchevêtrés. Selon la coloration du frottis, ils peuvent être difficiles à voir, mais même dans ce cas, on peut voir leur empreinte, puisqu'ils sont grands et que les cellules qu'ils couvrent ne sont pas colorées par le Wright. La structure fibreuse peut être moins visible lorsque leur coloration est très pâle.

La fibrine est un artefact commun provoqué par un prélèvement difficile ou un mélange inadéquat du sang avec l'anticoagulant. Le prélèvement difficile peut aussi mener à l'activation des plaquettes et de petits amas de plaquettes (beaucoup moins abondants que l'agglutination provoquée par l'intolérance à l'EDTA) qu'on retrouve libres ou adhérant à la fibrine. Il n'est donc pas un indicateur utile de pathologie.

Un caillot comme celui-ci est trop petit pour être visible à l'oeil nu, on le découvre au microscope. Comme tous les éléments de gros volume, il a tendance à être repoussé vers les marges du frottis. Il est tout de même assez mince pour constater de quoi il est fait: un noeud de fibrine enfermant des amas de plaquettes et des cellules sanguines de tous types. La coloration bleue est amplifiée par l'épaisseur de l'objet.

Si la fibrine est abondante, elle indique un prélèvement de mauvaise qualité et nuit à la numération cellulaire, en particulier au décompte des plaquettes et des leucocytes. Il peut être nécessaire de reprendre la prise de sang.

 Mucines:

Un élément extrêmement rare, mais qui pourrait être confondu avec de la fibrine, est une mucine sécrétée par certaines cellules cancéreuses envahissant la rate ou un autre organe en contact étroit avec la circulation sanguine, ce qui permet à leurs sécrétions de se mêler au sang. Ce phénomène s'accompagne d'un risque élevé d'embolie, d'endocardite et de CIVD, il représente un danger imminent pour le patient.

À première vue, la mucine peut ressembler à un noeud de fibrine médiocrement colorée, ou encore aux débris cytoplasmiques de cellules brisées. On doit donc remarquer sa coloration: les mucines sont acidophiles, leur couleur est plus près du rose que du bleu. La coloration est extrêmement pâle et facile à manquer; il a fallu chercher longtemps pour en trouver des traces suffisamment épaisses pour être visibles sur une photographie. Ce qu'on a le plus de chances de remarquer est son empreinte sur les cellules, qui est radicalement différente de celle laissée par la fibrine:

 

La fibrine peut déplacer les cellules ou bloquer leur coloration en s'y superposant, mais les déforme peu. Ces cellules piégées dans une masse muqueuse, au contraire, ont une forme bizarre, alors que les cellules libres dans la moitié supérieure de la photo ne présentent pas de poïkilocytose.

La présence d'une quantité visible de mucines sur un frottis sanguin est extrêmement rare et il est possible de ne jamais en observer, mais pour le cas où l'on tomberait dessus, il est important de ne pas la confondre avec de la fibrine et l'ignorer! Il faut l'indiquer au rapport et le référer à l'hématologue.

 GAGs:

Une masse acidophile amorphe semblable s'observe souvent sur les frottis de liquides biologiques.

Est-ce aussi un signe aussi sinistre? Par chance non! Les liquides séreux contiennent des glycoaminoglycanes (GAGs) et de l'acide hyaluronique, tous des surfactants hydrophiles chimiquement semblables aux mucines. Leur sécrétion peut être augmentée au point de créer des masses visibles au frottis, mais leur origine est le plus souvent liée à un état inflammatoire. Le mésothéliome en sécréterait aussi, une origine cancéreuse n'est donc pas exclue, mais l'inflammation est une condition de loin plus courante. Cet aspect est donc à noter au frottis, puisque des indices d'inflammation sont une information utile au médecin, mais le patient a de bonnes chances de s'en tirer à bon compte!