Rouleaux VS Agglutinats

 Certaines observations au microscope ne touchent pas la forme des cellules mais leur disposition. Les cellules sont normalement séparées, en suspension dans le plasma, mais certaines situation peut les mener à s'organiser en motifs particuliers.

Les rouleaux


Les rouleaux, plutôt fréquents, se forment lorsque les globules rouges s'empilent comme des rouleaux de pièces de monnaie, une disposition que leur forme plate favorise. Un rouleau peut se déplacer dans le liquide plus vite qu'un même nombre de cellules séparées, ce qui explique la corrélation entre la présence de rouleaux et le taux de sédimentation.

En situation normale, ils se séparent facilement, et la forme de rouleaux n'est pas présente sur un échantillon bien mélangé. Deux facteurs peuvent changer ce fait:

L'hyperprotéinémie: les rouleaux sont stabilisés par la viscosité d'un plasma riche en protéines. Le plus il est épais, le plus de rouleaux résistent à l'étalement et sont visibles sur le frottis. Ils sont le plus facile à observer dans la zone épaisse, car les cellules ont moins tendance à s'y séparer; en fait, dans la zone vraiment épaisse, il faut les ignorer, car les cellules sont serrées ensemble de force et leur disposition ne signifie rien.

L'hyperprotéinémie peut être causée par quelques conditions, mais l'une d'elle est beaucoup plus commune que les autres:

Inflammation: c'est de loin l'état le plus souvent associé à la présence de rouleaux. Qu'il s'agisse d'une réaction à une infection ou une maladie inflammatoire ou auto-immune, la protéine en excès est un mélange hétérogène d'immunoglobulines (anticorps). Puisque les gens vont à l'hôpital quand ils sont malades, il faut s'attendre à rencontrer souvent de telles situations!

 Paraprotéine: il s'agit d'anticorps anormaux, entiers ou en chaînes libres, sécrétés par des plasmocytes cancéreux. Ces anticorps ne sont pas fonctionnels et ne défendent pas l'organisme des pathogènes, mais il peuvent avoir un effet toxique sur les organes, en particulier les reins.

Hémoconcentration: Soit le garrot est resté en place trop longtemps, soit le patient est sévèrement déshydraté. Le sang ne contient pas tant plus de protéines que moins d'eau. Un nouveau prélèvement a de bonnes chances de ne plus avoir de rouleaux.

L'hypochromie est l'autre facteur jouant sur la formation de rouleaux: des globules rouges pauvres en hémoglobines, pâles, souvent associés à un état anémique, ont une forme plus plate et mince que la normale, et par une simple question de géométrie, sont plus portés à s'empiler. C'est un facteur de moindre importance, mais qui a son effet.

Les agglutinats

Les agglutinats sont beaucoup plus rares que les rouleaux, mais pour nous compliquer la tâche, ils peuvent coexister avec ceux-ci. Les agglutinats sont plus cohésifs que les rouleaux et ne se défont pas avec une bonne agitation, mais sont plus fragiles qu'un caillot et ne peuvent pas être ramassés avec un bâton. Ils peuvent devenir assez gros pour devenir visibles à l'oeil nu, voire figer tout le sang en une espèce de gelée.

Leur formation est due à une agglutinine froide, un anticorps anormal qui s'active au froid. Si leur température d'activation est suffisamment basse, ils ne causent pas de désagrément au patient, mais les plus actifs peuvent avoir un effet à la température du corps et causer des symptômes.

Une fois prélevé, le sang refroidit, alors même des agglutinines froides inoffensives in vivo deviennent actives. Dans les cas extrêmes, elles peuvent boucher les pigeurs des appareils, mais la plupart du temps, on devine d'abord leur présence par un résultat de CGMH impossiblement élevé.

Le CGMH représente la concentration en hémoglobine moyenne des globules rouges. Elle est calculée en divisant le taux d'hémoglobine par l'hématocrite (volume total des globules rouges). Les agglutinats empêchent le décompte correct des globules rouges et la mesure de leur volume, le calcul donne donc un résultat absurde. L'hémoglobine a une concentration maximale de 360 g/L et précipiterait s'il était en excès de ce taux. Tout résultat supérieur à ce chiffre reflète donc obligatoirement une interférence.

Par chance, la plupart du temps, les agglutinats se défont à la chaleur. Un petit tour au bain-marie ou à l'étuve, et la mesure sera bonne! Préparez un frottis avant et après le chauffage: il vous permettra une lecture sans l'interférence des agglutinats, et un où vous pourrez les quantifier.

Contrairement aux rouleaux, les agglutinats sont le plus visible dans la zone mince, là où les autres cellules sont bien séparées et qu'ils sont les seuls à rester groupés.

Pour comparer, voici la zone mince du frottis précédent, montrant des rouleaux beaucoup moins longs et beaucoup moins abondants:


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

La cellule mésothéliale (vidéo)

Frottis sanguin: empreinte digitale

Hémolyse intravasculaire